JAMAIS DEUX SANS TROIS
Wikipedia : « Une coïncidence est une occurrence simultanée et remarquable de circonstances ou d’évènements qui n’ont apparemment pas de connexions causales entre eux. La perception de coïncidences peut amener a interprétations surnaturelles, occultes, ou paranormales… Elle peut également conduire à des croyances fatalistes. »
Les coïncidences folles sont légion avec moi. Mon fils en raffole et du haut de ses 11 ans il trouve cela juste, normal.
Alors l’été n’est pas terminé mais ce shoot émotionnel qui vient de faire trembler, ce lundi 10 août à 19h18, mes jambes gonflées par la chaleur étouffante de Paris; me donne envie de reprendre mon clavier.
L’été a commencé en douceur, soirée imprévue en arrivant à Montélimar début juillet. Débarquant chez mon précieux ami à un anniversaire surprise, je me suis retrouvée vers deux heures du mat’, à nager nue avec 4 autre femmes, dans cette piscine à l’eau légèrement trouble. Quoi de mieux qu’une thérapie active. Se sentir libre, déboutonner ma robe, de la laisser tomber sur mes pieds, glisser dans l’eau, sans même me soucier des regards, sans même avoir honte de mes seins, de ce corps reconstruit, cabossé et couvert de cicatrices. Je portais une culotte, mais pas de soutien-gorge. Ma robe légère suffisait à mon décolleté.
Nous avons rapidement enlevé nos culottes et tendu nos verres avides de rosés à ceux restés au sec. Bonheur et simplicité. Respirer et savourer. L’été commençait fort. J’étais si bien.
Cette parenthèse terminée, j’ai récupéré mon fils à Lyon et nous sommes partis en vacances. Val d’Isère, la montagne les marmottes, le bonheur.
Et puis en rentrant d’une journée de marche vers un refuge du parc de la Vanoise, sur le petit chemin escarpé où nous ne pouvons pas marcher côte à côte, un chamois s’est glissé devant nous. Imaginez le bonheur dans les yeux de mon fils, nous l’avons suivi dix bonnes minutes. Arrivés dans un virage, il s’est perché sur un rocher, face à lui arrivait un couple sportif. Nous étions tous en arrêt, eux en direction du refuge, nous en direction du village, le chamois entre nous. Selfi chamois fait des deux côtés, on sourit et on se rend compte qu’on se connaît. FJ est un ami d’amis. On se voit de temps en temps et là, on se retrouve à 2000 mètre d’altitude, à 700 km de Paris. J’avoue j’en pince un peu pour lui. Franchement charmant le garçon. Mais le voir là avec sa copine m’a remis dans les cordes. Contente de le voir heureux. Un peu plus tard on se rendra compte qu’on loge même dans le même immeuble.
Pure folie des coïncidences de la vie. De ma vie. La première.
Nous avons ensuite pris la direction de la Normandie mon fils et moi. On aime Granville. On aime y retrouver nos amis, on aime s’y retrouver lui et moi. Cette ville nous enveloppe et nous renforce.
Cette semaine fut riche et simple. Le dernier jour avant notre départ j’ai décidé de l’emmener avec son ami qui nous a accompagné cette semaine, au restaurant. Il adore le P’tit Fourbi, il adore leurs pizzas, je crois que c’est un peu réconfortant et rassurant cet endroit. Nous y venons depuis des années.
Alors c’est parti, la voiture chargée des combi’ et de tout l’équipement pour le stage de voile qui se termine ce vendredi après-midi. Nous partons, sous une chaleur étouffante, visiter le bunker du Roc, ouvert ce 31 juillet. La passion de mon fils pout l’Histoire, pour les guerres, me rend terriblement fière. Belle balade sur la pointe, sous le phare. Il est midi mes deux pré-ados sont affamés. Nous partons donc en direction de ce petit restaurant sans prétention.
Et là, malheur ! Il est fermé. Tout tourne dans ma tête, trouver une pizzeria à Granville. Premier reflex le port. Il y a deux trois restaurants un peu trop touristiques pour moi mais qui proposent des pizzas. On fait demi tour et on arrive en moins de 5 minutes à la Régate. La serveuse me demande « intérieur ou extérieur ? »… Je réponds du tac au tac « intérieur, j’ai trop chaud et il fait frais dedans ». Oui oui , on est bien en Normandie.
On s’installe, je saisis la carte et je fais un tour d’horizon du regard. Bam, je stoppe net, sur ma droite, là, assis en terrasse, je vois ma gynéco et mon psy, accompagnés d’une femme, sans doute la mère de l’un d’eux et de leur fils qui doit avoir l’âge du mien.
Alors là je souris mais j’y crois à peine. Tous deux ont été les soignants les plus proches de moi pendant cette foutue traversée du désert, pendant mes combats contre ce cancer. Sans eux je n’aurais pas tenu. Alors les voir là, alors que je termine juste ma reconstruction et que je me sens légère et enfin libre, me met une claque. La boucle est bouclée.
Pure folie des coïncidences de la vie. De ma vie. La deuxième.
Les vacances avec mon fils, loin de Paris sont terminées. Ressourcée et bronzée. Etonnamment la Normandie plait parfaitement à ma peau et mon teint halé est parfait.
J’attaque, et c’est peu dire, le mois d’août avec une détermination impressionnante. Je reste à Paris pour ce 8ème mois de l’année. Je vois bondir certains de vous… Rester à Paris après ce confinement fou. Bonheur de retrouver cette ville, vraiment. Je termine mon livre dans le calme de cette ville qui fait battre mon cœur.
J’avais peur de ne pas m’organiser un truc, et de m’ennuyer. Je crois que ce mois va passer très vite. Mes deux plus fidèles amants, sont partis en famille reprendre des forces. J’avais aussi peur de ne pas vraiment m’y retrouver. Erreur. L’un d’eux m’écris très souvent. Pur bonheur de savoir qu’on pense à moi.
J’ai quelques messages de « Monsieur C. », je l’ai nommé comme ça dans mon téléphone. Comme ça je me rappelle à chaque fois qu’il m’écrit ce qu’il m’a fait.
Nous n’avons fait l’amour qu’une fois, j’avais envie d’un deuxième essai je crois. Même si le premier était assez peu vivifiant, il me semblait y avoir du potentiel chez cet homme. Mais plus question de venir chez moi. Il n’a pas voulu, pas eu le courage, de réserver un hôtel. Essayant encore une fois de me faire culpabiliser, en me disant que je n’avais pas assez « d’entrain ». Erreur. Ici aussi. Les manipulateurs je les renifle, il semble être un beau spécimen. Le garçon joue, mais se brûle les ailes. Il ne se doute pas que je peux foutre un beau bordel dans sa vie, mais il a de la chance comme diraient César et Clark, « d’être tombé sur toi ». Il ne se laissera donc plus envouter par mon corps. Sa nouvelle compagne découvrira assez tôt qui il est. J’ai tourné cette page avec un sourire et une détermination incroyable. L’eau calme sur laquelle je navigue cet été me fait tellement de bien.
En attendant j’ai décidé de profiter de Paris, de ses restaurants de ses bars et de ses soirées aoûtiennes. J’ai commencé avec un verre sur la terrasse éphémère de l’Aquarium de Paris. Assise face à ma copine la Tour Eiffel, j’ai commencé mon mois d’août, drapée dans une nouvelle robe noire, mes écouteurs accrochés à mes oreilles, et le vent doux et frais parisien caressant mes épaules. Etonnante soirée ; je n’avais pas du tout ma place ici, j’ai hésité et puis je me suis installée quand même. Il y a tout le Bling Bling bas de gamme qui tournoie autour de moi. Ce faire voir, venir draguer, le carré VIP, le Truck Cigar, le DJ… Quelques couples semblent perdus, installés au milieu des tables où les jeunes filles se tiennent bien droites sur des tallons aiguilles bien inconfortables sur ce sol poussiéreux, et sablonneux.
Les tables autour de moi se sont remplies rapidement. J’ai renvoyé dans sa tanière un garçon très lourd et sans charme.
J'ai refermé mon Mac, et je suis rentrée à pieds. Envie de retourner m’asseoir sur le rebord de ce pont menant à la Tour Eiffel, où je venais tous les samedis et dimanches soir pendant le confinement ; seule assise là. J’attendais que la Dame de Fer s’illumine.
Je suis Catsitter cet été. Moi qui suis allergique aux chats, j’ai proposé très simplement à mes amis de garder Picasso. Il ne ménage pas mes mollets (j’ai d’ailleurs vérifié grâce à lui, et a ses dents acérées, mes vaccins anti tétanos, et il faut vite que je fasse le rappel…), mais il me permet de rythmer mes journées ; j’ai terminé le premier jet de mon livre avec lui. J’attends les exemplaires à corriger et je m’occupe en faisant de la cuisine, du dessin. C’était opération cornichons ce lundi. J’adore les cornichons faits maison. Ceux à l’estragon. Et je fais les miens depuis des années. C’était même une vraie compète’ pour mon ex belle-mère qui les loupaient tout le temps. Drôle de coïncidence. Cette belle famille qui ne m’a pas donné de nouvelles, qui n’a pas pris de nouvelles depuis que leur amour de fils, mon ex donc, le père de mon fils quoi, a mis les voiles en plein milieu de mon cancer avec sa douce et fraiche collègue de bureau. Apparemment ils n’arrivent pas à décrocher ce fichu téléphone. C’est peut être trop tard ? Non il n’est jamais trop tard pour admettre qu’on a merdé. Mais leur égo doit être bien trop haut pour faire cela.
Trois ans sans nouvelles. Ils voient leur unique petit fils, ma perle à moi, de temps en temps, mais jamais ils n’ont pris de mes nouvelles. J’avais bien tourné cette page aussi, enfin je croyais. Et puis BAM. Aujourd’hui j’avais envie d’aller nager, la chaleur parisienne devient insupportable. J’ai fait mon sac, glissé mon bikini oui oui je vous assure. Envie d’assumer mon ventre, envie de juste nager le plus simplement possible. Hop direction la piscine Keller. Désenchantement rapide. Je suis arrivée dans la rue de la piscine, une file longue, mais longue, attendait devant la porte. J’ai fait demi tour. Pas le courage d’attendre pour me retrouver cul à cul dans un bassin surchargé. Retour chez moi. Passage au bio c’est bon pour acheter la salade qui accompagnera mes nems. Je Passe devant ce restaurant, ce bar qui est juste en face de chez moi sur le boulevard. Je tourne la tête et BAM qui est là. Mes ex beaux parents. Et merde. Je ralentis, J. m’a reconnue, il s’est levé, je me suis stoppée et j’ai reculé, il m’a fait signe de rentrer. J’ai enlevé mes oreillettes, et j’ai avancé vers eux. Pas le temps d’enfiler un masque. Ils sont seuls attablés là. En moins de 10 secondes je suis face à eux. J. et debout, F. est assise, elle me regarde et me dit « Ah ben on savait bien qu’un jour on vous croiserait ». J’ai failli m’étrangler. J’ai répondu sans réfléchir , « 2 ans et demi que j’habite ici, vous avez un studio juste à coté et vous n’avez pas pris de mes nouvelles depuis 3 ans, facile d’attendre la coïncidence d’une rencontre ». Il m’a proposé de m’asseoir. J’ai remis mes écouteurs et j’ai dit non merci en tournant les talons.
Mes jambes tremblaient. Uppercut en plein cœur. Douze ans avec leur fils et pas un mot pour savoir si j’allais bien alors que le cancer me rongeait . Comme j’ai hâte de leur expédier mon livre. Si vous saviez.
Pure folie des coïncidences de la vie. De ma vie. La troisième.
Celle-ci elle m’a soufflée.
Ma douce amie Véro m’a envoyé un message si juste. « Ne les laisse pas briser ce que tu as réussi à créer pour ta sérénité ». Elle a tellement raison. Ce matin j’ai passé un long moment avec elle au téléphone, Picasso caressant mes mollets, miaulant et réclamant de l’attention. Sur cette terrasse folle face à ma chère amie la Tour Eiffel.
Elle a tellement raison.
Bon cet été est une thérapie incroyable, j’ai commencé nue dans une piscine, croisé un garçon qui me trouble en gravissant un sommet, dégusté une pizza dans un périmètre bien trop fou avec celle qui a mis les mots sur mon cancer et celui qui m’a très simplement aidé à supporter le départ de mon amoureux, et là, la cerise sur la gâteau, croiser ce duo sans cœur qui m’a glacé.
Nous sommes le 10 août… Hier c’était la saint Amour. Allez on y va les gars, je suis prête, mon cœur est ouvert… Go Go Go !
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